Cette expérimentation vise à faire lire intégralement une pièce appartenant au patrimoine culture, Cyrano de Bergerac, et à cerner la complexité du personnage de Cyrano tout en éduquant aux médias à travers l'utilisation d'un réseau social (découvrir Twitter, paramétrer un compte et suivre un fil de discussion.
Une ressource proposée par Camille Boisson
Contexte didactique
La séquence se déroule sur six semaines. Elle suit immédiatement une courte séquence consacrée à l’étude de Humulus le Muet de Jean ANOUILH qui a permis aux élèves de réviser les différents procédés comiques et de se confronter à l’écriture d’une scène. Au préalable, les élèves doivent avoir lu la pièce d’Edmond ROSTAND.
Cette séquence a été réalisée en collaboration avec la documentaliste du collège qui est intervenue lors de la réécriture afin de guider les élèves dans le travail.
Compétences et objectifs
- Lire intégralement une œuvre littéraire appartenant au patrimoine culturel : Cyrano de Bergerac.
- Montrer la part de comique et de tragique dans la pièce.
- Cerner la complexité du personnage de Cyrano.
Compétences numériques
- Eduquer aux médias et à l'information à travers l'utilisation d'un réseau social : découvrir Twitter, paramétrer un compte et suivre un fil de discussion.
Contraintes matérielles
- Vérifier que l'accès à Twitter n'est pas bloqué
- Informer les parents et demander leur autorisation pour que leur enfant publie sur les réseaux sociaux.
Déroulé de la séquence
Séance 1 : Cyrano de Bergerac, l'homme et le personnage de théâtre
Cette séance se déroule en deux temps. Tout d’abord, les élèves sont en salle informatique et font une recherche sur le véritable Cyrano de Bergerac. Puis, nous comparons ce que nous savons de l’homme avec le personnage de théâtre lors de sa première intervention dans la pièce (I.3 et I.4).
Séance 2 : Un duelliste accompli
Étude de la tirade des nez (I.4) dont les élèves auront un passage à apprendre. Nous montrerons que Cyrano manie aussi bien les mots que l’épée.
Séance 3 : Un poète rebelle
Étude de la tirade « Non merci ! » (II.8). Il s’agit de faire percevoir le besoin d’indépendance de Cyrano.
Séance 4 : Cyrano victorieux
Étude de la tirade « Non merci ! » (II.8). Il s’agit de faire percevoir le besoin d’indépendance de Cyrano.
Séance 5 : Réécriture de la scène avec Twitter
Les élèves se sont répartis dans des groupes de trois et chaque groupe s’est vu attribuer un personnage : Cyrano, Christian, Roxane, Le Bret, Ragueneau, D’Artagnan, Carbon de Castel Jaloux, De Guiche et Valvert.
2e heure en salle informatique. Les élèves paramètrent les comptes créés, en une demi-heure : ils présentent leur personnage en 160 caractères en mettant en évidence sa relation avec Cyrano. A l’issue de cette période, en utilisant le vidéoprojecteur afin que tous les groupes puissent suivre la correction et profiter de l’ensemble des remarques, nous revenons sur leur présentation, améliorons le contenu et reprenons l’orthographe. Pour terminer la séance, ils cherchent les différents personnages créés par la classe, s’abonnent entre eux et protègent leurs tweets. Dans le cadre de l’Éducation Aux Médias, nous montrons ainsi aux élèves comment gérer leurs contacts, leurs abonnés et comment protéger leur identité.
Afin que la discussion puisse commencer rapidement, chaque groupe doit préparer ses premières interventions pour la séance suivante : il rédige trois tweets, connaissant par avance le contenu des interventions de Cyrano et Christian.
3e heure en salle informatique. En une demi-‐heure, les différents personnages doivent réagir au récit de Cyrano et aux interruptions de Christian et commenter les interventions, en fonction de leur relation avec chacun tout en respectant l’esprit du XVII° siècle. Les positions des intervenants sont claires : il y a les défenseurs de Cyrano et les admirateurs de Christian ; seul le groupe « Roxane » soutient à la fois les deux personnages. A l’issue de cette période, nous revenons sur le fil de discussion en mettant en évidence la pertinence des interventions (respect du personnage, fidélité au texte, trait d’esprit…) et les manques (tweet isolé et hors de propos, orthographe). Sortis de l’instantané de la discussion, les élèves perçoivent les incohérences comme les erreurs dues à la précipitation. S’ils sont très fiers quand le professeur met en évidence un trait d’esprit très juste, ils n’apprécient pas qu’on insiste sur les fautes d’orthographe ; cependant, ils prennent ainsi conscience des traces qu’ils laissent et qui contribuent à leur identité numérique.
Séance 6 : Cyrano amoureux
A partir de différents extraits, l’objectif de cette séance est de montrer que l’amour de Cyrano pour Roxane ne cesse d’osciller entre espoir et déception et que Cyrano ne perd ses moyens que sur le plan amoureux.
Séance 7 : La mort de Cyrano
Etude de la dernière scène (V.6) dans le but de montrer que ce dénouement est le lieu de l’expression d’un amour raté.
Séance 8 : Bilan de fin de séquence
Les questions portent sur l’œuvre intégrale et sur un extrait, la mort de Christian (IV.10)
Bilan de l'expérimentation
- Le bilan est positif tant du point de vue disciplinaire que par rapport à l’Éducation aux médias.
- La perspective d’une réécriture par l’intermédiaire des réseaux sociaux motive
particulièrement les élèves. Beaucoup ont pris plaisir à ce travail qui se différencie des pratiques plus scolaires et sont rentrés dans la peau de leur personnage. Cependant, seul le support a changé car cet exercice est bien un exercice de français avec des consignes à suivre : les élèves devaient respecter la scène initiale, les contraintes de l’écriture fragmentaire et surveiller leur orthographe.
- Le retour avec l’utilisation du vidéoprojecteur est un moment où leur travail d’écriture est doublement valorisé. D’une part, les élèves prennent du recul et voient plus clairement leurs interventions dans la discussion ; tous les groupes ont contribué à l’échange. D’autre part, les tweets contenant un trait d’esprit se distinguent des autres : ils sont remarqués et admirés pas l’ensemble de la classe.
- Le travail sur l’Éducation aux médias est également une réussite pour deux raisons. D’une part, les élèves apprécient de travailler sur les réseaux sociaux et sont demandeurs de conseils sur le paramétrage des comptes et sur la protection de leur identité numérique. D’autre part, ils ont progressivement maîtrisé le fonctionnement des tweets et du fil de discussion : la possibilité de répondre à un tweet particulier, la possibilité de supprimer un tweet, de le réécrire. Au cours de l’exercice, ils ont dû s’adapter : découvrir les différentes possibilités d’un fil de discussion et organiser leur pensée.
- L’enseignant doit contourner une contrainte matérielle imposée par Twitter : il est nécessaire de faire créer les comptes par avance à partir d’une adresse mèl créée pour l’occasion. Twitter bloque les inscriptions lorsqu’il reconnaît une adresse IP ; les élèves doivent ouvrir les comptes chez eux.
- Le souci de vouloir protéger les tweets des élèves est apparu incompatible avec un hashtag (un marqueur qui permet de regrouper des tweets) : les tweets protégés n’apparaissent pas dans un fil de discussion public. Le professeur doit alors choisir : soit la discussion est publique, donc accessible à tout le monde dans un hashtag, soit la discussion sera privée, protégée mais finalement il sera impossible de la retrouver dans un fil de discussion.
- Twitter semble être un réseau social un peu difficile à maîtriser pour des élèves de 4e. Certes, la plupart des groupes ont perçu au fur et à mesure le fonctionnement d’un fil de discussion mais tous n’en sont pas capables, ce qui a donné, pour la classe la plus faible, un fil un peu décousu. En effet, les élèves en difficultés ne parviennent pas à organiser leur pensée afin de suivre la discussion. Afin que tous maîtrisent ce fonctionnement, cet exercice mériterait d’être reconduit.
- L’immédiateté des réactions ne laisse pas aux élèves ayant le plus de difficultés avec l’orthographe le temps de se corriger. Le professeur suit la discussion et signale aux groupes l’absence de correction de leur tweet : certains en ont beaucoup à supprimer et à réécrire. Toutefois, le professeur n’a pas la possibilité de les faire tous corriger et beaucoup d’erreurs restent. Dans le retour, il est intéressant de revenir sur les erreurs et de montrer aux élèves les traces qu’ils laissent et qui vont constituer leur identité numérique.